Réforme de la formation professionnelle : vers une nouvelle façon de travailler


7 novembre 2017

 

La réforme de la formation professionnelle qui s’ouvre est la plus déterminante pour l’équilibre social de notre pays ces vingt prochaines années. C’est la raison pour laquelle le gouvernement doit aller aussi loin qu’il est possible, même si les partenaires sociaux devront ravaler leur orgueil, leur conservatisme et leurs rentes. Le monde connaît aujourd’hui la plus grande vague de destruction-créatrice schumpétérienne depuis le XIXe siècle. Le numérique, l’intelligence artificielle et la robotique dynamitent l’économie du XXe siècle, ses métiers et les façons de travailler. L’immense sujet pour nos sociétés développées n’est pas de gérer la raréfaction du travail, cette peur atavique qui revient à chaque fois que l’innovation bouscule nos sociétés. Notre défi, c’est d’adapter notre capital humain, salariés, indépendants, chômeurs, à ce nouvel environnement pour faire de notre pays une société du plein-travail.

 

A y regarder de plus près, il faut distinguer trois sujets. D’abord, de nombreux métiers vont disparaître et d’autres apparaître. Les véhicules autonomes ou la robotique chirurgicale ne font l’affaire ni des conducteurs de poids lourds ni des chirurgiens. Ce n’est pas un drame dans la mesure où, historiquement, les métiers qui ont disparu étaient pénibles et ont été remplacés par des emplois qui l’étaient moins. Les noms des rues des villes de France en témoignent : rue des Tanneurs, rue des Charrons, rue des Déchargeurs, rue des Lavandières… Le problème, c’est que notre système actuel de formation est incapable d’identifier ces nouveaux métiers de la cybersécurité, de l’espace ou du deep learning. Certains tremblent devant la fin du travail alors que ce sont des pénuries massives de main d’œuvre qui nous menacent, faute de préparation. Ensuite, la plupart des métiers vont, non pas disparaître, mais évoluer. Certaines tâches vont disparaître. Hôtesses de l’air et stewards ne serviront plus les boissons et les plats car un robot pourra parfaitement s’en charger. Mais ces personnels continueront d’assurer la sécurité et de « faire la police » à l’intérieur des avions. Là aussi, la formation professionnelle doit être capable de « requalifier » les salariés concernés. Enfin, les façons de travailler elles-mêmes évoluent vers davantage d’autonomie. Le salariat ne disparaîtra pas, mais les contrats dans lequel sont spécifiés précisément les horaires et les lieux de de travail oui. Cette mutation aussi doit se préparer.

 

La paresse de l’esprit conduirait à distribuer à chacun un revenu universel. Ceux qui pourront s’adapter sortiront gagnants de cette vague d’innovation. Les autres, chômeurs actuels ou futurs, bénéficieront toujours d’un filet de sécurité de quelques centaines d’euros par mois à vie. Mais notre pays mérite mieux. La formation professionnelle doit s’adresser à tous ceux dont l’emploi est menacé par la technologie et leur proposer, soit une montée en niveau de leur qualification, soit une bifurcation de leur carrière vers des secteurs qui recrutent tout en étant rémunérateurs. Il y en a beaucoup, dans l’artisanat en particulier.

 

Voilà pour les principes. En pratique, la réforme de la formation professionnelle doit agir sur le financement, l’organisation et le contenu des formations. Le compte personnel de formation (CPF) doit devenir universel, déplafonné et monétisable. Les intermédiaires du type Opca doivent augmenter considérablement leur efficacité dans l’accompagnement des publics fragiles. Enfin, il faut créer une agence totalement indépendante qui évolue la qualité des formations, qui, aujourd’hui, laisse fortement à désirer. Le président de la République avait évoqué une révolution pendant sa campagne. S’il est un domaine dans lequel une révolution est indiquée, c’est bien celui de la formation professionnelle.

 

Article publié dans L’Express le 1er novembre 2017

 

 

 

 

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