Prix de l’immobilier parisien : les raisons de la folie


immobilier
12 septembre 2019

Paris – Photo by Alexander Kagan on Unsplash

Le prix de vente d’un mètre carré parisien vient de dépasser la symbolique barre de 10 000 euros pour la première fois de l’histoire. Le temps passe et les records tombent. Un économiste, Jacques Friggit s’est régalé à reconstituer l’évolution des prix de l’immobilier à Paris depuis l’an de grâce 1 200. L’histoire longue nous montre que la hausse des prix est un phénomène constant, lié au développement économique et à la croissance de la population.

Depuis le règne de Philippe Auguste, les appartements parisiens n’ont ainsi vu leur valeur chuter dans les grandes largeurs que par cinq fois :

– après la peste noire,

– sur la fin de la Guerre de Cent ans,

– pendant les guerres de religion,

– lors de la Première Guerre Mondiale 

– et au cours de la Seconde Guerre Mondiale.

Les investisseurs peuvent dormir tranquille, le cours de la pierre ne s’effondre que pendant les cataclysmes humains et économiques. En moyenne depuis le Moyen-Âge, les prix de l’immobilier parisien s’élèvent tranquillement de 0,6% par an. Pourquoi ? Parce que la population française augmente, que la France est centralisée et que l’on construit peu dans sa capitale. La loi économique la plus basique qui soit, celle de l’offre et de la demande, joue à plein.

Seulement, par-delà les évolutions au long court, les prix semblent s’envoler au XXIe siècle. En 2000, un mètre carré coûtait 2 740 €. En 2019, il tutoie donc les 10 000 € depuis le mois d’août. Les prix de l’immobilier parisien ont ainsi explosé de 265% quand les prix à la consommation augmentaient tranquillement de 28%.

L’accélération semble s’expliquer par trois facteurs majeurs :

– les taux,

– la démographie,

– l’internationalisation.

Tout d’abord, la baisse drastique des taux d’emprunts a évidemment dopé le pouvoir d’achat immobilier des ménages. Des travaux de l’OFCE ont montré que la politique expansionniste de la BCE avait stimulé les prix dans les arrondissements les plus modestes, à l’est et au nord. Ensuite, l’allongement de la durée de vie repousse la mise sur le marché des biens. La population française augmente via la hausse de l’espérance de vie. Ce n’est donc pas tant un effet sur la demande que sur l’offre qui se joue ici : les biens sont possédés plus longtemps et la tension sur le marché se renforce.  Enfin, Paris est une ville mondiale. La mégapole attire des investisseurs du monde entier et foule de riches internationaux veulent y posséder un pied à terre. La hausse mondiale des revenus des plus riches alimente les prix. En outre, d’après Paris Europlace, ce sont 1 500 financiers qui seraient rentrés de Londres l’an dernier à cause du Brexit. Avec une moyenne de 45 000 transactions par an dans Paris intra-muros, cela représenterait une hausse de la demande de 3%.

La folie des prix parisiens va-t-elle durer ? En économie, la théorie du plafond de verre n’existe pas et le prix moyen à Hong Kong atteint aujourd’hui 13 500 € quand celui de New York flirte avec le 12 500 €. Tant que Paris restera une ville qui plaît aux riches du monde entier, que la population française augmentera et que l’économie ne sera pas cataclysmique, les prix devraient augmenter à moyen-terme.

Quid d’une violente baisse des taux ? Les travaux de l’OFCE sous-entendent que seuls les quartiers les plus modestes en seraient affectés. Cela pourrait néanmoins ralentir le rythme haussier. Et a priori, le retour de nos expatriés londoniens devrait continuer de tirer les prix à la hausse pour quelques années. Enfin, un violent choc d’offre avec des constructions massives n’est pas pour demain. Le risque majeur semble ainsi politique. L’élection d’un candidat extrême, à droite comme à gauche, et une action fortement interventionniste et anti-étrangers pourrait diminuer l’attractivité internationale et les perspectives économiques. Comme à Londres où le Brexit a ralenti la hausse et détendu le marché. Mais sans faire s’effondrer les prix pour autant.

Une perspective plus réjouissante serait de mener une ambitieuse politique publique pour rendre abordable aux classes moyennes et aux familles le marché parisien. Il faudrait de concert décentraliser et déconcentrer la France, améliorer drastiquement les réseaux de transports du Grand Paris, construire dans le neuf, inciter à mettre ses biens sur le marché, taxer les résidences secondaires. Bref, un vaste programme qui dépasse largement les pouvoirs de la future équipe municipale.

Article Asterès pour MeilleurTaux