Comment la cosmétique française s’adapte à la mode du local


30 juillet 2019

La France reste le champion mondial de la cosmétique. Les exportations ont encore progressé de 6,3 % l’an dernier. Mais l’essor de l’achat local, des applications comme Yuka ou des marques lancées par les stars des réseaux sociaux imposent de s’adapter.
Parfums, rouges à lèvres, soins visage… La cosmétique française continue de rayonner à l’international. Les exportations ont passé le cap des 14,5 milliards en 2018, en hausse de 6,3 %. Ce qui fait du secteur le troisième contributeur à la balance commerciale. La France reste le champion mondial de la beauté, avec 23 % de parts de marché.

On connaît L’Oréal, LVMH, Clarins, mais derrière les grands acteurs se cachent une myriade de PME, dont 82 % ont un actionnaire familial unique. Une filière très tournée vers l’international qui, des fournisseurs de matières premières aux fabricants, en passant par la distribution sélective, affiche un chiffre d’affaires de 45 milliards d’euros, et emploie 246.000 salariés, indique une étude du cabinet Asterès pour la Fédération des entreprises de la beauté (FEBEA).

20 % des achats par les touristes
« Cette prédominance des exportations, qui compte pour 60 % de l’activité, oblige les entreprises à gagner en qualité, et renforce leur position y compris en France », souligne Nicolas Bouzou, économiste et directeur d’Asterès. De fait, les touristes étrangers en visite dans l’Hexagone y font leurs emplettes de produits de beauté. Leurs dépenses comptent pour 20 % du chiffre d’affaires local des entreprises, soit 3 milliards d’euros.
La marque « France » a donc une réelle portée dans ce secteur. La preuve, selon la FEBEA, les produits cosmétiques tricolores peuvent afficher un prix en moyenne 30 % supérieur à celui d’un produit équivalent d’un autre pays. Une puissance, qui repose d’abord sur un imaginaire fort et un art de vivre. « La cosmétique française fait rêver, elle évoque Paris, la ville lumière, le chic de la femme française, partout copiée, et de plus en plus le terroir, notamment la Provence », relève Patrick O’Quin, le président de la FEBEA.
‘est le constat de l’étude du cabinet CH2 sur l’attractivité de la France dans ce domaine. La qualité des produits, leur innocuité est aussi un atout non négligeable dans cette compétition mondiale. Par exemple aux yeux des consommateurs chinois pour lesquels, la sécurité est une forte demande. L’innovation est un autre moteur, plutôt conduite par les grands groupes, que les start-up. « Sur 15 milliards investis dans les start-up en 2018, seuls 100 millions d’euros l’ont été dans la cosmétique », note la Fédération.

Des menaces sociétales
Pour autant, « cette puissance est menacée par les évolutions sociétales », relève Patrick O’Quin. En question, un « patriotisme économique », mêlant à la fois une volonté d’acheter local et une plus forte conscience écologique. Le développement de la « slow consommation » qui touche aussi les cosmétiques, reprenant l’idée de réduire « les achats de produits dits futiles pour redonner du sens à sa consommation », est un autre frein.
Sans parler de nouvelles applications, comme Yuka, QuelCosmetic ou INCI Beauty, qui analysent la composition de produits, et des études des associations de consommateurs qui tirent régulièrement la sonnette d’alarme sur la présence de perturbateurs endocriniens dans les produits. « Nos concurrents s’appuient sur ces publications pour semer le doute », s’inquiète le président. La transparence, et la tracabilité sont devenues des exigences des Millennials. Ce qui favorise les cosmétiques faits maison, qui font une percée. Des défis auquel devront répondre les marques, en passant par un plus fort engagement en matière de développement durable.
La nouvelle concurrence des stars des réseaux sociaux aux Etats-Unis, qui ont lancé leur marque via le digital, est aussi surveillée à la loupe. Plus que l’essor des marques japonaises ou coréennes . Les Kylie Jenner, Rihanna, Anastasia Soare et autres Huda Kattan surfent sur ce marché de la beauté et réalisent déjà plusieurs centaines de millions de dollars, avec la vente de produits pour les sourcils ou de fonds de teint. Un phénomène pour l’instant cantonné outre-Atlantique, mais qui pourrait déferler en Europe.

Par Dominique CHAPUIS pour Les Echos

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