Les biotechnologies végétales : élément incontournable du nouveau cycle de croissance
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Vers un nouveau cycle de croissance porté par l’innovation
Contrairement à ce que pensent les tenants de la « longue stagnation », l’économie mondiale est au départ du cycle d’innovation le plus fort depuis ce que l’on a nommé « la première révolution industrielle ». Le 21ème siècle sera marqué par l’émergence des NBIC dans le quotidien des entreprises et des ménages. NBIC, soit quatre lettres pour quatre domaines scientifiques en pleine effervescence : Nanotechnologies, Biotechnologies, Informatique et sciences Cognitives. Les avancées dans les NBIC s’opèrent par bonds et vont se traduire par de puissantes vagues d’innovations qui vont impacter l’ensemble des secteurs économiques, modifiant les modes de production ainsi que l’offre de biens et de services. Suivant le principe schumpétérien de la « destruction-créatrice », les activités rendues obsolètes par le progrès technique disparaîtront et de nouvelles émergeront. Dans l’ensemble, les NBIC vont accroître la productivité du système productif au cours des prochaines décennies. L’emploi bénéficiera d’un nouvel élan de croissance économique et de nouveaux produits et services contribueront à améliorer le bien-être des populations.
Une agriculture mondiale portée par les biotechnologies
Les biotechnologies végétales constituent l’un des principaux sous-segments des NBIC. Ce domaine en pleine ébullition produit, notamment, des plantes génétiquement modifiées (PGM) qui contribuent depuis près de 20 ans à mieux nourrir la population mondiale. Les PGM permettent d’accroître les rendements agricoles tout en réduisant l’empreinte écologique des cultures. En limitant les recours aux produits phytosanitaires, elles allègent la charge de travail des agriculteurs et protègent leur santé, comme celle des consommateurs. Le génie génétique permet en outre d’améliorer les qualités nutritionnelles des plantes. Le Riz doré, enrichi en bêta-carotène, permet ainsi de lutter contre les carences en vitamine A qui affectent de nombreux de pays en développement.
Les progrès en cours et à venir dans les biotechnologies vertes vont continuer d’améliorer les propriétés des plantes pour mieux répondre aux besoins des populations, tant dans les pays en développement qu’au sein des pays riches. De nouvelles utilisations industrielles des plantes seront en outre rendues possibles. Les industries agro-alimentaires, les bio-carburants, la pharmacie et cosmétique, le bois et papier, ou encore les industries plastiques et textiles bénéficient de produits agricoles innovants qui ouvriront la voie à de nouvelles applications commerciales. L’enjeu industriel et social est colossal : il s’agit d’accroître la compétitivité industrielle pour générer richesses et emplois sur le territoire français dans le cadre d’un développement durable. En effet, les recherches contemporaines montrent que l’utilisation de biotechnologies végétales, outre qu’elle favorise l’adaptation des plantes au changement climatique, contribue à la diminution du stock de CO2 dans l’atmosphère, notamment en diminuant les besoins en engrais azoté et les passages de tracteurs (et donc la consommation de carburant).
Un retard européen et français préjudiciable à la croissance de long terme
En dix ans, l’étendue des cultures de PGM a plus que doublé dans le monde. Vingt-huit pays en cultivent aujourd’hui à grande échelle, en tête desquels figurent les États-Unis. Au total, ce sont 17 millions d’agriculteurs qui exploitent des PGM à travers le monde, sur une surface de 181 millions d’hectares, soit 13% des terres arables de la planète. A ce jour, il s’agit essentiellement de soja, de maïs, de coton et de colza.
L’Europe est presque absente du classement des pays producteurs de PGM, avec seulement 5 pays qui en cultivent très modestement. L’indécision au niveau de l’UE et la position de la France (pays influent dans certaines zones de la planète comme l’Afrique) ont des conséquences sur les décisions prises au niveau mondial. En s’appuyant sur les gains financiers nets que des agriculteurs du monde entier retirent des PGM, et en observant le potentiel inexploité des cultures de PGM dans l’Union européenne, Park et al. (2011) ont évalué le manque à gagner pour les agriculteurs de l’Union entre 443 et 929 millions d’euros par an.
L’interdiction d’en produire en France est un signal négatif envoyé aux chercheurs, aux semenciers, aux agriculteurs et aux industriels français. Pour ces acteurs, avides de progrès et confrontés à la concurrence internationale, l’utilisation des avancées scientifiques est une condition nécessaire au maintien de leur compétitivité à long terme, et donc de leur pérennité. Si la France venait à maintenir son opposition de principe aux PGM, elle se couperait de marchés mondiaux en forte croissance. A long terme, le préjudice pour l’économie française se mesurera en termes de croissance perdue et d’emplois, tant dans les secteurs agricoles qu’industriels que, par effet d’entrainement, dans les services.
Rationaliser l’usage du principe de précaution
Le moratoire français sur la culture des PGM est une mesure disproportionnée et en contradiction avec l’esprit du principe de précaution. En cas de risques potentiels, mal identifiés ou mal maîtrisés, d’une technologie nouvelle à fort intérêt économique et social, le principe de précaution, tel qu’inscrit dans la Constitution, suppose en effet l’adoption de « procédures d’évaluation » et de « mesures provisoires et proportionnées ». Or malgré 19 années d’expérience des cultures de PGM à grande échelle, 13% des terres agricoles utilisées dans le monde et des milliards de repas servis, la connaissance de leurs effets sur la santé et l’environnement s’est considérablement améliorée et aucune étude scientifique sérieuse n’a relevé de menace avérée.
Il apparaît donc souhaitable que la recherche française sur les biotechnologies vertes soit de nouveau soutenue activement par les pouvoirs publics, à la lumière des connaissances scientifiques du moment.