Le Brexit n’a pas encore eu d’impact sur le marché immobilier
Pour beaucoup d’observateurs, le Brexit allait présenter une aubaine pour les autres grandes villes européennes, Paris et Frankfurt en tête. Cela n’est pas encore le cas. Deux ans après le vote et après le pré-accord de Bruxelles, les investissements restent stables à cause de l’incertitude liée au Brexit. Déménager un siège social est en effet une décision coûteuse pour les entreprises qui attendent donc d’être sûres des conséquences réelles du Brexit. Les investisseurs résidentiels sont également frileux, achetant mais ne déménageant pas en attendant d’en savoir plus.
Un « Brexodus » des bureaux paralysé par l’incertitude
L’aversion au risque des entreprises les paralyse quant à leurs décisions d’investissement post-Brexit.
Paradoxalement, c’est l’incapacité du gouvernement britannique à prendre des décisions qui le sauve pour l’instant. Les entreprises espèrent en effet encore un accord avantageux, voire un recul total et un retour à la normale. Ainsi, loin de l’exode (ou Brexodus) prévu par les observateurs, le Crédit Foncier reporte seulement trois investissements ayant été faits à Paris à la suite du Brexit : Bank of America, Chubb et l’European Bank Authority, qui regroupent ensemble à peine 1% des surfaces de bureau louables à Paris. Londres n’enregistre aucun impact du Brexit sur ses surfaces de bureau occupées, et affiche même un taux de vacance en baisse, à 5,6% en 2018 contre 7,8% il y a 2 ans.
Déménager un siège social coûte cher. Outre les frais directs, il existe aussi une myriade de coûts indirects : discontinuité de l’activité, coûts de relocalisation des employés, temps d’adaptation aux nouveaux locaux et à la fiscalité locale.
Selon Bloomberg, le coût de redéployer un seul employé de Londres à Paris est de 50 000£, soit 2 milliards £ pour redéployer les 40 000 employés de toutes les grandes banques d’investissement.
Ces coûts n’incluent pas les coûts légaux, bien plus durs à estimer. L’adage anglais classique « Don’t move until you have to » prend ici un tout nouveau sens.
Les grandes entreprises dont le siège se trouve à Londres ne bougeront pas tant qu’elles ne seront pas sûres de ce qu’elles pourront perdre avec le Brexit.
Sur le marché résidentiel, les investisseurs agissent mais restent prudents
Pour l’immobilier résidentiel, l’effet est plus marqué mais reste insignifiant pour les britanniques. Paris, la Côte d’Azur et les Alpes enregistrent une forte hausse de la demande dans l’immobilier de luxe (prix au- dessus de 2 millions €), avec des investissements en hausse de 6,9% en 2018.
Ces achats proviennent principalement de français installés à Londres ou de riches britanniques.
Cette hausse de demande en France ne s’accompagne pas d’une baisse au Royaume-Uni, ni d’un effet sur les marchés hors luxe. Les riches investissent en plus de garder leurs biens à Londres afin de ne pas risquer de tout perdre si le Brexit n’a pas lieu. L’investissement à Londres continue d’être porté par une majorité d’acquéreurs étrangers : Inde, Chine et Moyen-Orient, ce qui confirme que son attractivité reste forte. Là encore l’aversion au risque sauve le marché britannique de la catastrophe.
Les investisseurs incertains observent avec grande attention les négociations. L’espoir d’un bon deal ou d’un recul est aujourd’hui le barrage qui retient le flot de départs britanniques vers l’Europe continentale. Avec le pré-accord et la déclaration d’intentions de l’Union Européenne, le Gouvernement de Theresa May ne va plus pouvoir maintenir cet espoir longtemps.
Les incertitudes du Brexit toucheront bientôt à leur fin, et avec elles les incertitudes des investisseurs.
Édito MeilleurTaux