Alerte éco – Relancer l'investissement, lequel et comment ?


Alerte éco
8 avril 2015

Le Premier Ministre Manuel Valls annonce aujourd’hui des mesures fiscales et de financement afin de relancer l’investissement des entreprises. Seulement, les causes de la stagnation de l’investissement des entreprises semblent mal comprises par le gouvernement.

– L’investissement des entreprises non-financières est considéré, à juste titre, comme un levier efficace de croissance économique. Dans une phase de stagnation des prix, de chômage élevé, de croissance atone et de déficit commercial, l’investissement a l’avantage d’actionner à la fois les leviers d’offre et de demande. En effet, investir améliore l’offre (soit en la rendant plus productive soit en l’élargissant) et la demande (investir signifie souvent consommer des biens d’équipement ou des services).

– La stagnation de l’investissement des entreprises françaises inquiète le gouvernement : -0,6% en 2013, +0,7% en 2014. Après la création du CICE, matérialisée principalement en hausse de salaires, un nouveau dispositif fiscal (déduction élargie des amortissements) et une nouvelle structure de financement des PME sont mis en place. Dans l’esprit du gouvernement, les entreprises n’investissent pas car elles n’en ont pas les moyens : le politique menée vise donc à améliorer la capacité de financement (via les marges ou le financement extérieur).

Pourtant, il semble que la stagnation de l’investissement des entreprises s’explique par la faiblesse des perspectives et carnets de commande. En 2014 dans l’industrie, les enquêtes de conjoncture montrent que les chefs d’entreprises avaient conscience de l’amélioration des conditions de financement mais que la stagnation des investissements s’expliquait par la stagnation des demandes intérieures et internationales.

– Plus globalement, depuis 2007, les travaux économétriques de l’Insee montrent que les évolutions de l’investissement n’ont répondu qu’aux variations de demande, n’étant que peu affectés par le coût du financement. Une politique de tuyauterie fiscale ou le lancement d’un nouveau fond public-privé ne devraient donc pas permettre de relancer l’investissement des entreprises.

Les entreprises françaises investiront plus si leurs perspectives s’améliorent, c’est donc une politique globale de compétitivité qui permettra de relancer l’investissement. Attendre le retour de la croissance de l’investissement des entreprises constitue-t-il une utopie politico-économique ?

Contrairement aux idées reçues et répandues, les entreprises françaises investissent plus aujourd’hui que début 2000. Le taux d’investissement (investissement / valeur ajoutée) est passé de 21,9% en 2000 à 22,5% en 2013 (le maximum ayant été atteint en 2008). La stabilité de l’investissement français est à comparer avec une baisse allant de 2 à 7,5 points dans les autres pays européens.

Une fois retirés les investissements immobiliers, le taux d’investissement des entreprises françaises est largement supérieur aux taux allemands et anglais : 19% pour la France, 16% pour l’Allemagne, 13% pour le Royaume-Uni en 2013. La stagnation de l’investissement des entreprises françaises s’expliquent donc par la faible demande mais aussi par le niveau élevé de ces investissements : il n’y a pas d’effet rattrapage ou rebond.

Au cours des dernières phases de reprise de l’économie française (1997 et 2003), l’investissement n’a pas joué un effet relanceur mais un effet suiveur. La reprise de l’activité a précédé la reprise des investissements.

L’enjeu actuellement porté par l’investissement des entreprises françaises ne tient pas à sa reprise globale mais plutôt au type d’investissement des entreprises. Depuis 2007, les investissements de renouvellement sont plus courants que les investissements dans le lancement de nouveaux produits et dans la modernisation des chaînes de production. La baisse de l’euro permet une baisse des prix des produits français face à leurs concurrents non-européens. La reprise de l’investissement doit permettre une amélioration de la qualité des produits. 

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