Législatives: le programme économique des Républicains n’est pas sérieux


Législatives 2017
2 juin 2017

« François Baroin, le chef de file LR pour les législatives, le 21 avril. En tournant la page de l’échec de François Fillon à la présidentielle, la droite et le centre ont perdu les qualités de son programme » – Photo afp.com/Patrick KOVARIK

Le programme économique de François Fillon avait trois mérites : la clarté, la radicalité et la précision. Sa clarté émanait d’un diagnostic limpide (et correct) sur l’économie française. Celle-ci souffre d’un excès de excès de réglementation, de dépenses publiques et de compétitivité, d’où un programme libéral axé sur la flexibilité du droit du travail, le recul du périmètre de l’État et les allègements de charges et d’impôts pour les entreprises et les détenteurs de capital. Sa radicalité transparaissait dans sa volonté de supprimer 500 000 postes de fonctionnaires en 5 ans ou de mettre fin aux 35 heures dans le privé comme dans le public. Sa précision était physiquement visible quand on avait sous les yeux cet austère document écrit en petits caractères. On peut disserter à l’infini sur la moralité du candidat ou son style : il n’empêche que son projet était à la hauteur des problèmes économiques de la France et qu’il voulait traiter les sujets dans le bon sens : la compétitivité et l’emploi d’abord, le pouvoir d’achat ensuite.

Visiblement plus intéressés par l’apparence que par la crédibilité et par la politique que par l’économie (sans imaginer que tous ces aspects pourraient d’ailleurs se rejoindre avec un peu de préparation et d’astuce), Les Républicains proposent pour les législatives un programme qui perd les trois qualités de celui de François Fillon. D’abord, il manque de clarté. La hausse de la TVA (qui devait financer des baisses de charges) disparaît et un allègement de l’impôt sur le revenu est introduit. A quelle stratégie macroéconomique ce changement complet d’orientation fiscale correspond-il ? Les Républicains considèrent-ils que la France souffre d’un manque de demande globale qui doit être soigné par une relance keynésienne ? Ensuite, le projet des Républicains perd en radicalité. La baisse de la dépense publique est moins ambitieuse que les propositions de Fillon. La dégressivité des allocations chômage, qui figurait dans le programme du candidat, ne semble pas conservée. Une partie des allègements de charge passe à la trappe. Enfin, il est moins précis. Les 35 heures sont-elles supprimées ? A quelle date l’âge légal de départ en retraite converge à 65 ans ? Impossible de le dire.

Le projet des Républicains pèche aussi par manque de crédibilité. En proposant une hausse des petites retraites tout en annonçant un allègement de l’impôt sur le revenu, le parti de droite retombe dans les pires travers de la politique française depuis 30 ans, qui consiste à promettre sans se donner les moyens de tenir ses engagements. On se croirait revenu au temps du RPR de Jacques Chirac.

Par effet de comparaison, la proposition d’une majorité En Marche n’en est, du point de vue économique et sociale tout au moins, que plus séduisante. Sur les trois sujets prioritaires de la période qui s’ouvre, à savoir la réforme du marché du travail, la fiscalité du capital et le renforcement de la gouvernance de la zone euro, le projet présidentiel est aussi clair et cohérent que celui des Républicains. Il est même sans doute plus crédible financièrement, ce qui signifie que, même si les engagements d’En Marche en matière de fiscalité, (par exemple sur l’ISF) vont moins loin que ceux de la droite, ils ont plus de chances d’être tenus. En outre, une fraction importante de l’opinion publique et les syndicats devraient constituer une force d’opposition puissante à la politique économique plutôt libérale du trio Le Maire – Darmanin – Pénicaud. La rue sera agitée. Il serait bon, pour les réformes, que l’Assemblée Nationale soit calme.

Article publié dans L’Express du 24 mai 2017